Solution e-commerce pour start-up : n’optez pas pour la F1 si vous ne pouvez pas vous permettre le pilote et l’écurie

Au moment de se lancer dans la vente en ligne, le choix de la solution e-commerce à mettre en œuvre se pose pour les startups, comme pour les sociétés d’un âge respectable. Je n’ai pas l’ambition d’établir un inventaire des solutions e-commerce disponibles et d’en analyser les forces et faiblesses. Je souhaite simplement rappeler une évidence : rien ne sert d’investir dans une formule 1 si on ne peut se permettre ni le pilote, ni l’écurie.

Et pourtant, ce scénario est tellement classique. Une société décide de se lancer dans la vente en ligne. Elle décrit tant bien que mal ses besoins fonctionnels. Elle les complique ensuite en y intégrant des idées glanées chez les concurrents ou auprès des mastodontes de la vente en ligne. Elle prend alors conseil auprès d’une agence web qui lui conseille une formule 1 qui couvre tous ses besoins actuels et à venir, et qui est belle comme quéqu’chose qui brille. Elle y consacre tout son budget e-commerce. Pour la gestion du contenu, le marketing, la communication, les opérations, la logistique, le service client, il faudra se débrouiller avec les moyens du bord. Et elle se retrouve bien démunie le jour de la livraison de la formule 1, sans pilote, ni écurie pour faire tourner la bête. Elle conclut alors rapidement que la vente en ligne, ça ne marche pas.

Une alternative serait de faire ses premiers pas dans la vente en ligne avec une solution clé en main, en se limitant aux fonctionnalités les plus standards et en limitant les articles proposés à la vente à vos bestsellers. Pour le lancement de mon site d’achat groupé de vin Levindesvoisins.be, j’ai opté pour l’achat du nom de domaine (moins de 10 euros par an), un simplissime site WordPress (gratuit) combiné avec le module de vente en ligne Ecwid (35 euros/mois pour la formule business qui couvre tous mes besoins) et Mailchimp pour le gestion de ma newsletter (gratuit jusqu’à 2.000) abonnés. Et j’ai consacré quelques jours à la mise en place de l’ensemble, évidemment. Mais même si j’avais dû engager un freelance pour m’aider à mettre tout cela en place, il y en aurait eu pour moins de 5.000 euros, solutions techniques et main d’œuvre comprise.

Ma conclusion est qu’il vaut mieux apprendre à rouler en Cambio que d’avoir une F1 remisée dans un garage. Cela laisse du temps et du budget pour tester la vente en ligne en y consacrant les efforts nécessaires en termes de gestion de contenu, marketing, communication, opérations, logistique, support client, …

 

Les startups du vin ont tout faux !

Depuis le lancement du guide du vin Vinogusto.com en 2007, j’ai pris connaissance d’une multitude de projets de startup liée au monde du vin, entre autres via le Founder Institute, les Vinocamps, le Wine Business Innovation Summit, la European Digital Wine Communication Conference ou les salles de cours de l’INSEEC à Bordeaux. Et je pense que les aspirants entrepreneurs font systématiquement l’erreur que Vinogusto, Cork’d, Snooth, Findawine, Adegga,… et bien d’autres guides du vin sur Internet ont faite il y a 7-8 ans. Ils pensent encore et toujours que les consommateurs sont malheureux dans leurs achats de vin et espèrent que quelqu’un va les aider à mieux choisir leurs bouteilles. Mais ce n’est pas le cas. La majorité des consommateurs sont très heureux avec leurs achats de vin tels qu’ils sont et ne sont pas du tout à la recherche de solution pour les aider à mieux choisir. Les vins qu’ils achètent un peu au hasard chez le caviste, en grande surface, sur internet, au resto ou dans les bars à vin leur conviennent très bien. Toujours plus ou moins bon, dans leur budget, sans se casser la tête, et avec la fonctionnalité la plus recherchée qui est bien au rendez-vous : le vin contient de l’alcool, on peut le boire en société, ça rend heureux et beau, lubrifie les relations humaines, et c’est avant tout cela qu’on lui demande.

Je raconte n’importe quoi? Je ne pense pas. Dans les bars à vin, les consommateurs demandent un blanc sec, ou un blanc sucré, un rouge fruité sans manifester le moindre intérêt pour la région, le cépage, le millésime ou encore le producteur. Au restaurant, les cartes sont généralement criblées de fautes et totalement incomplète, ça n’empêche pas les clients de commander. Au supermarché, il n’y a pas de conseil et on y vend 80% du vin en Belgique. Chez le caviste, on est parfois très bien, souvent trop vite orienté et il n’est pas rare que le consommateur ne sache pas ce qu’il a acheté, enfin si, du blanc, ou du rouge, ou du rosé, à plus ou moins tel prix, peut-être de tel pays ou région. Ou alors, il connaît quand même le cépage. Et franchement, il n’est pas nécessaire d’en savoir plus pour pouvoir profiter d’un verre de vin…

Pourtant, 8 ans après la ruée sur les sites internet d’aide aux consommateurs, nous assistons à une nouvelle vague de solutions révolutionnaires pour aider les consommateurs à résoudre un problème qu’ils n’ont pas : les wine apps. Que ce soit Vivino (qui vient de lever 25 millions de dollars – ça me rappelle Snooth il n’y a pas si longtemps), Delectable, Goot, Wineadvisor ou je ne sais encore quelle application, l’idée est la même qu’il y a une petite dizaine d’année : nous allons aider le consommateur à bien choisir son vin. 2 améliorations techniques apportées en 10 ans : on peut prendre l’app partout avec soi vu qu’elle tient sur le smartphone et on peut consulter la db en faisant une simple photo du vin plutôt que de devoir taper le nom pour faire une recherche. Sinon, l’idée est toujours la même : des tonnes d’avis des consommateurs du monde entier vont vous permettre de mettre la main sur les meilleures bouteilles. Tu parles…

Si on prend l’exemple de Vivino, les infos sont à ce point lacunaires qu’on ne peut pas s’y fier. Et si on creuse, on se rend compte que la majorité des utilisateurs abandonnent l’application après avoir joué à 1) vérifier que la reconnaissance d’étiquette fonctionne, 2) vérifier la valeur présumée des bouteilles bues. Pour le reste, les contenus et avis sont légers, très légers… Et côté business model? Les choses ne sont pas annoncées clairement, mais il semblerait que l’on mise principalement sur le récolte des adresses e-mail des consommateurs. Etape n°1 pour vendre des vins. Car sans clients potentiels, pas de vente.

Et cela nous amène au vrai problème à résoudre : les producteurs de vin ont du mal à vendre leurs vins. Il faut donc s’atteler à aider les producteurs à vendre les vins, et pas à aider les consommateurs à choisir les vins.